Comment le Lorrain Aprex Solutions a utilisé l’intelligence artificielle avant la vogue de l’IA
Article de Philippe Bohlinger pour Traces Ecrites News : L'actualité économique de Bourgogne-Franche Comté et du Grand Est.
Paru le 13 novembre 2024
En pleine croissance, la PME de 28 salariés cofondée en 2017 par deux docteurs en physique des plasmas anticipe 10 à 15 recrutements en 2025.
Dans le flot de start-up créées ces dernières années en Lorraine, Aprex Solutions figure parmi les rares exemples à avoir transformé les promesses en emplois, et en nombre significatif. Pour cause, la société cofondée par Romain Baude et Mikaël Désécures en 2017 à Nancy a mis sur pied une innovation technologique répondant à un besoin fondamental des industriels : améliorer le repérage des pièces défectueuses.
Déployée par la jeune société de 28 salariés aujourd’hui installée à Pulligny (Meurthe-et-Moselle), à une demi-heure de Nancy, elle est issue de travaux conduits à l’Institut Jean Lamour (CNRS-Université de Lorraine). Ce puissant laboratoire de 500 chercheurs en sciences des matériaux a offert un terreau favorable à l’émergence de la jeune pousse.
Les fondateurs d’Aprex Solutions planchaient en son sein, en tant que docteurs en physique des plasmas, sur la fusion thermonucléaire, une technologie très prometteuse car susceptible de délivrer une énergie quasi illimitée, mais délicate à maîtriser. Ils y ont développé des instruments de mesure et les méthodes d’analyse des particules à l’intérieur d’un réacteur nucléaire.
A l’époque, l’objectif consistait à contrôler les interactions entre la paroi du réacteur et le plasma, un gaz porté à une température de plusieurs millions de degrés. « Nous étions convaincus de la pertinence de notre innovation pour observer si des particules de la paroi se retrouvaient dans le plasma. Mais nous gardions un sentiment de frustration : qu’adviendrait-il d’elle si nous changions de sujet de recherche ? », se rappelle Romain Baude.
Les deux entrepreneurs ont alors réfléchi à démocratiser leur technologie avec l’aide de l’Institut Jean Lamour. Le centre de recherche a accueilli leur start-up au sein de son incubateur pendant ses quatre premières années d’existence. L’équipe de recherche-et-développement d’Aprex Solutions, composée de trois personnes, travaille d’ailleurs toujours en lien étroit avec le laboratoire nancéien.
La start-up a commencé à convaincre des industriels et à démontrer la pertinence de sa solution de manière ludique, par exemple en étudiant la trajectoire des bulles dans une coupe de champagne. Elle a dû gagner la confiance d’acteurs dont la marge de tolérance en produits non-conformes est extrêmement basse, de l’ordre de 1 pièces pour 1.000 voire 1 pièce pour 10.000. Un sacré challenge !
Mais l’association de trois méthodes d’analyse dans un logiciel unique, développé en interne, a fait mouche, notamment auprès de Saint-Gobain PAM le célèbre fabricant lorrain de canalisations en fonte, du charcutier industriel Herta ou encore de l’équipementier franc-comtois Lisi Automotive. Avec ce dernier, Aprex Solutions collabore depuis trois ans, « pour une tolérance qui, chez lui, avoisine davantage les 1 pour 1 million auprès », glisse Romain Baude.
Le dirigeant livre l’une des clés de la valeur ajoutée que son entreprise apporte : la capacité à avoir développé un outil logiciel qui associe trois méthodes d’analyse différentes, « des classiques de mesures dimensionnelles et colorimétriques et d’autres recourant à des algorithmes autoadaptatifs, plus connus aujourd’hui sous le nom d’IA, pour intelligence artificielle. »
Toutefois, ces algorithmes d’IA utilisés par Aprex Solutions demeurent très différents des modèles grand public comme ChatGPT. A commencer par le fait qu’eux non aucun droit à l’erreur. « La difficulté réside dans le fait que les entreprises ont – heureusement - très peu de produits non conformes. Or des non-conformités sont indispensables à l’apprentissage de nos algorithmes et au contrôle de leur bon fonctionnement. Du coup, nous avons mis au point nos propres logiciels d’apprentissage », détaille Romain Baude.
Mais l’IA ne fait pas tout. La PME a également développé des logiciels d’exécution et de l’ingénierie vision, dans le but de sélectionner les capteurs les mieux adaptés à ses mesures. Ces technologies complémentaires permettent d’obtenir des images en deux ou trois dimensions, des images thermographiques, d’identifier la composition chimique d’un produit, etc.
Afin de renforcer ses effectifs et d’étendre la présence d’Aprex Solutions en France et en Europe, ses cofondateurs ont annoncé en juin dernier une levée de fonds de 2,1 millions d’euros auprès de fonds d’entrepreneurs (Yeast en Lorraine, Hand Partners, groupe Mermoz et PBA- Paris Business Angels) et de partenaires institutionnels et bancaires (Bpifrance, Banque populaire, CIC et BNP Paribas). La société, au chiffre d'affaires non communiqué, anticipe 10 à 15 recrutements sur l’année 2025.
--------------------------------------------
Nous remercions vivement TRACES ECRITES NEWS et Philippe Bohlinger de cette mise en avant et vous invitons chaleureusement à suivre l'actualité économique de Bourgogne-Franche Comté et du Grand Est sur : https://www.tracesecritesnews.fr/