Sécurisation d'un processus de maintenance de très haute exigence grâce à l'IA pour EDF : La Story

Sécurisation d'un processus de maintenance de très haute exigence grâce à l'IA pour EDF : La Story

08 03 2024 - Hélène GEORGE

L'expertise d'APREX Solutions au service de la sécurisation de processus de maintenance de très haute exigence pour le nucléaire.

ou Comment la solution de computer vision par intelligence artificielle d'APREX permet d'optimiser l'efficacité des opérations de maintenance de la centrale de Cattenom.

Témoignages recueillis lors de la table ronde "La Communauté des Offreurs de Solutions du Grand Est, une dynamique au service de la transformation des industries. Quelle valeur ajoutée pour vos projets ?" organisée par la COS sur le Salon BE 5.0 en novembre 2023.

Autour de la table : 
Bernard Bloch – Chargé de Mission Transformation & Innovation chez ES, membre de la COS
Jean-François CAMUS – Chargé de Mission Innovation chez EDF, membre de la COS
Romain BAUDE – CEO et Co-fondateur d’APREX Solutions, membre de la COS
Tous trois, sont membres de la Communauté des Offreurs de Solutions (COS)

Bernard Bloch : EDF, vous avez plusieurs casquettes dans la Communauté des offreurs.

Jean-François CAMUS :
Effectivement, on a cette particularité chez EDF d’être à la fois offreur de solutions, grâce à toutes les filiales et participations du groupe EDF : Perfesco, Agregio, EDF ENR, Izivia… toute une constellation de sociétés qui offrent des solutions pour les industriels. Mais on est, nous même un industriel, avec une implantation industrielle, dans le Grand Est qui est assez significative avec 3 centrales nucléaires en exploitation, un cycle combiné gaz thermique en Lorraine, sans oublier l'hydraulique. 

EDF est un industriel actif sur le Grand Est qui recherche de solutions pour améliorer ses performances : performance à la fois industrielle, performance en termes de sécurité, performance en termes de sûreté des installations. Nous sommes donc à l'affût de toutes les technologies, tous les savoir-faire du territoire, pour nous faire grandir sur ces domaines. Nous avons une démarche d'open innovation aussi qui est développée sur le territoire pour être en lien avec les acteurs de l'innovation et établir des partenariats, des collaborations avec ces acteurs, dans une logique gagnant-gagnant entre nous et ces acteurs.

B.B. : Vous êtes à la fois donneur d’ordre, offreur de solution, adhérent de la COS, et vitrine même de l’Industrie du Futur sur certains sites. APREX Solution est également adhérent de la COS et offreurs de solutions.
Jean-François, Romain, parlez-nous de ce projet : une belle histoire, une success story, celle du développement d’un assistant opérateur pour la réalisation de la cartographie finale d’assemblages combustibles dans les centrales de production nucléaire.

J-F.C. : Effectivement, dans cette démarche d'Open innovation, on a toute cette relation avec le territoire. Et puis il y a aussi des actions qu'on peut mener périodiquement, dont l'aboutissement a eu lieu en en septembre dernier, avec l’opération des Trophées EDF Pulse Grand Est que j'ai pu organiser et qui a permis de collecter déjà les besoins des entités opérationnelles du territoire, et les porter à la connaissance des acteurs de l'innovation du territoire afin qu'ils puissent apporter des solutions. Et c'est comme ça, notamment, qu'on a pu initier un travail avec APREX sur la centrale nucléaire de Cattenom.

Romain BAUDE :
A l’issue du prix EDF Pulse que l’on a remporté, merci encore, on a effectivement identifié avec EDF un sujet assez précis sur le site de Cattenom, qui visait à aider, accompagner les opérateurs dans les phases de rechargement du réacteur. Donc les phases de rechargement du réacteur, ce sont ces phases où le réacteur nucléaire est ouvert et où les éléments combustibles à l'intérieur du réacteur sont interchangés.
C'est un protocole très, très cadré, vous l'imaginez à un point extrêmement élevé, on a difficilement vu plus cadré que ça, où effectivement les consignes viennent à la fois de l'Agence de sûreté nucléaire, donc avec des positionnements de ces assemblages combustibles.  

 

C'est schématiquement, la représentation du cœur du réacteur nucléaire. Chaque petit carré représente un barreau qui va contenir du combustible nucléaire.
Le positionnement de chaque assemblage ici est donné par l'Agence de sécurité nucléaire et dépend de l'âge de ce barreau, de son potentiel énergétique, et cetera, et donc chaque assemblage voit sa position bouger et évoluer au cours du temps à l'intérieur de ce réacteur. Et donc pour pouvoir suivre les changements et les positions de ces assemblages combustibles, vous avez des opérateurs qui viennent s'assurer que l'assemblage qui est amené dans le réacteur porte bien la référence qui a été donnée par l'Agence de sûreté nucléaire et qu’il va venir se positionner au bon endroit.
Donc ce travail se fait dans des conditions très délicates, puisque généralement ce travail se fait sur des tranches de rechargement, donc le réacteur est mis en pause momentanément, il va dégager encore énormément d'énergie, peu de radiations mais beaucoup d'énergie avec une température d'eau importante et les opérateurs doivent travailler à venir détecter, et lire, les références des assemblages combustibles, au fond de la piscine, donc à presque 6 mètres de fond, avec une eau bouillonnante. Vous imaginez un cours d'eau en déplacement. C'est effectivement la convection thermique qui met en mouvement l'eau et qui va générer beaucoup de perturbations. Donc c'est un travail qui prend aujourd'hui beaucoup de temps, parce que c'est fait avec énormément de rigueur et le droit à l'erreur n'existe absolument pas.  

Et le sujet d'EDF c'était de pouvoir réfléchir et proposer un assistant à leurs opérateurs, pour leur permettre, à la fois de mieux lire, peut-être, avec davantage de confiance et en tout cas un avis machine qui pourrait dire : « effectivement j'ai bien lu ça, je suis d'accord avec toi », et en plus, de faire le matching avec les éléments donnés par l’Agence de sûreté. C'est ça la problématique à laquelle nous avons répondu.

J-F.C. : En complément pour témoigner de l'enjeu de cette opération, ce qu'on appelle les arrêts tranches, c'est quand on arrête le réacteur. Chaque jour est compté en fait, et ça exige une préparation, un suivi extrêmement rigoureux, parce que chaque jour de retard, c’est de l’ordre du million d'euros de perte pour l'entreprise. Donc il faut faire vite, mais bien, parce qu'il y a des enjeux de sûreté derrière qui sont très importants et donc on ne veut pas se louper. Et là, l'apport de la technologie d'APREX est essentiel en termes de performance industrielle, économique et aussi en termes de sûreté.

La solution technique qui a été mise en œuvre.

R.B. : La solution qu'on a pu apporter c'est sur la base de nos connaissances. Le fait pour lequel EDF a souhaité travailler avec nous, c'est aussi grâce au à notre histoire. 
Avant de créer APREX Solutions, j'ai moi-même travaillé dans le domaine du nucléaire, plus précisément dans le domaine de la fusion nucléaire. Le savoir-faire et les technologies que l'on met à disposition aujourd'hui chez APREX Solutions, sont issues de cette expérience et de ce savoir-faire.
Donc les enjeux de fiabilité, de performance, d'exigence dans la qualité des résultats, c'est culturellement quelque chose qui est ancré au fond de nous et qui guide l'ensemble de nos développements.

On a mis au service de ce projet, ces réflexes et cette méthodologie de travail, pour produire un logiciel qui va vraiment interagir avec des opérateurs, qui ne sont pas du tout spécialistes de l'analyse d'images, pour produire un logiciel répondant à deux objectifs :

  1. Faire de la lecture automatique de caractères, dans des conditions les plus horribles que vous pouvez imaginer. On arrive aujourd'hui à faire lire des caractères par le système à des niveaux de fiabilité et des niveaux de performance bien plus élevés que l'œil humain n'est en mesure de le faire. Les algorithmes aujourd'hui travaillent mieux que l'humain sur la lecture, parce qu'ils sont en mesure de lire beaucoup plus vite, plus de données.On a beaucoup travailler à faire en sorte que les algorithmes puissent en plus cumuler de l'information au travers des différentes images, pour donner un diagnostic, non pas basé sur l'analyse d'une seule image, mais d'une multitude d'images.
  2. Embarquer dans le logiciel des fonctionnalités de matching, pour lier entre eux des fichiers d'éléments, des rappels de sécurité : « avez-vous bien vérifié que et cetera… »,  jusqu'à créer cette cartographie de traçabilité qui va pouvoir être réutilisée et revérifiée a posteriori par des humains, puisque in fine, ce sont les opérateurs d'EDF qui vont pouvoir dire « oui ou non, on peut refermer on peut relancer ». Le sujet n’'est pas de faire en sorte que le système se substitue à l'opérateur, c'est vraiment un assistant.

Donc le fond du sujet sur lequel on a travaillé et qui nous a demandé beaucoup de matière grise, c'est le niveau de fiabilité que l'on a atteint avec la lecture de ces caractères, dans des environnements extrêmement complexes.

B.B. : Là, on est typiquement sur une solution qui est déclinable sur d'autres centrales. Comment est-ce perçu justement par EDF et par la R&D ? Parce qu'on sait que c'est quand même un gros écosystème EDF…

JFC : Tout à fait. Alors ce qui est ce qui est génial dans l'histoire, c'est qu’un acteur local comme EDF travaille avec un acteur local de l'innovation, une entreprise innovante pour développer ensemble des choses. 
Donc APREX fait du business avec EDF, peut-être capitalisera t’elle aussi sur l'image d'EDF, pourquoi pas... et nous, EDF, mettons en avant une nouvelle techno qui nous permet d'être plus performants.
Finalement si ça marche sur la centrale de Cattenom et bien ça va marcher aussi sur les autres centrales… dans le Grand Est, mais aussi au-delà, au niveau national, et du coup ça va donner un rayonnement national à APREX. Notre R&D s'intéresse beaucoup à ce qui se passe actuellement sur Cattenom pour capitaliser aussi le sujet.
Cattenom va porter le sujet au sein d'initiatives internes au groupe EDF et au réseau des centrales via un challenge d’innovation qui va permettre de faire rayonner la technologie d'APREX au sein du groupe EDF et du réseau des centrales nucléaires en France.

B.B. : Romain, pour toi, c'est quoi les secrets d’un partenariat, d'un business réussi entre un industriel et un offreur de solutions ?

R.B. : Dans un premier temps, c'est effectivement le côté communauté. Donc ce sujet-là il n’est pas sorti du chapeau, on ne se lance pas dans un projet comme ça, sur du nucléaire, notamment sur du réacteur, si on n’a pas un minimum de confiance qui est déjà là, présente. Si on n’apprend pas déjà à se connaître. Ce sont des sujets avec des enjeux quand même extrêmement élevés. On ne peut vraiment pas faire n'importe quoi. Donc je pense effectivement que l'intérêt des communautés comme celle des Offreurs de solutions, qui mettent en relation des écosystèmes d'Offreurs et de donneurs d'ordres, c’est  effectivement d’apprendre à se connaître. 
Et puis on réfléchit : « tiens, j'ai peut-être un sujet. Ce serait bien qu'on se voit… » On se voit une fois, 2 fois, on en reparle effectivement, et on avance. Jusqu'à nous aussi pouvoir rentrer en contact avec la R&D d’EDF et pouvoir envisager des collaborations aussi intéressantes qui deviennent du coup enrichissantes pour tout le monde.
Donc, c'est déjà se connaître, se rencontrer, d'être là et puis ensuite on rentre dans le concret du boulot et puis c'est toute la méthodologie de travail qui va amener au succès.

B.B. : EDF et la COS donc, avec Laurent Perez, qui était depuis l'origine dans la communauté des offres solutions. Toi Jean-François, tu y es depuis que tu as pris le poste. Comment vois-tu la communauté des Offreurs par rapport à EDF justement ?

J-F.C. : C'est un vivier de compétences de savoir-faire. Et mon rôle c'est d'identifier les besoins du groupe EDF et de mettre en relation les Offreurs de solutions avec les besoins du groupe EDF. Ma finalité à moi, c’est de contribuer au développement économique local, par des relations gagnant-gagnant entre le groupe EDF et des offreurs de solutions. Comme je l'expliquais, il y a du business qui se fait. Et puis il y a la performance de l'autre côté, en plus. Et ça, c'est super intéressant.

Laurent PEREZ, chargé de Mission ancrage Territorial et Innovation chez EDF, témoigne de la rencontre avec APREX Solutions et la valeur ajoutée de leur solutions pour la maintenance des rechargements combustibles de la centrale nucléaire de Cattenom.

B.B. : On parlait avant des prix au d’EDF Pulse. Quand ils ont été lancés, on avait organisé une session où tu étais venu présenter les prix EDF Pulse à tous les offreurs. On avait après diffusé plus largement, pour qu'au moins ce qu'on apporte aux offreurs serve à tout l'écosystème, et qu'ils puissent le voir. Du coup, j'en profite pour faire aussi un appel à tous les industriels qui voudraient challenger des offreurs de solutions ou autres : n'hésitez pas à contacter la Communauté des offreurs, parce que notre rôle, c'est vraiment d’aider les donneurs d’ordre industriels, à répondre à leurs besoins. 
Et c'est exactement en fait ce qu’il s'est passé avec EDF.

J-F.C. : Exactement ! Une grande richesse de cet écosystème sur lequel il est intéressant de capitaliser.

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Cette interview a eu lieu dans le cadre de la table ronde organisée par la COS sur le salon BE 5.0 2023.
Cette Table ronde "La COS une dynamique au service de la transformation des industriels"
a permis d’expliquer pourquoi des offreurs de solutions se fédèrent pour contribuer à réussir la transformation des industries du Grand Est.
Elle faisait intervenir deux binômes d’offreurs de solutions : Jean-François Camus (EDF) et Romain Baude (APREX Solutions) d’une part, et d'autre part : Alexis Béatrix (The WiW) et Gérald Simon (Selmoni) pour présenter la complémentarité de leurs expertises au service de solutions clients. Cette table-ronde, organisée le 29 novembre 2023 à l’occasion du salon BE 5.0 de l’industrie du futur, était animée par Bernard Bloch (ÉS).
Voir le replay de table ronde dans son intégralité
 


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