Une première mondiale dans l’analyse d’image par IA pour le nucléaire

Une première mondiale dans l’analyse d’image par IA pour le nucléaire

08 04 2024 - Frédéric BROCHARD

Développement d’une application par IA supervisée pour catégoriser le comportement de filaments de plasma

S’appuyant sur des algorithmes d’analyse d’images issus de la recherche en fusion nucléaire, APREX Solutions est également partenaire de cette recherche. Notre équipe R&D vient ainsi de co-signer un article de recherche publié dans la revue Physical Review E (lien). Le sujet ? L’étude des interactions non linéaires entre des filaments de plasmas (appelés « blobs »), dans un réacteur à fusion magnétique.

Dans un plasma de fusion nucléaire, ces filaments sont responsables d’un transport de chaleur et de particules en travers des lignes de champ magnétique, réduisant l’efficacité du réacteur. 
Pour mieux comprendre : toute réduction du confinement du plasma va réduire la performance du réacteur. Ces filaments résultent d’un phénomène d’auto-organisation de la turbulence responsable de la coalescence des microstructures, aboutissant à la formation de plus grosses structures. Ce qui engendre une perte de matière au cœur du réacteur.

Dans d’autres domaines, c’est le même type de phénomène qui est responsable de la formation des cyclones (vous savez, le fameux battement d’ailes du papillon qui engendre une tempête quelques jours plus tard à des milliers de kilomètres de là…). Cela s’applique aussi en économie où l'auto-organisation est le fruit d’interactions complexes et souvent irrationnelles des acteurs du marché, conduisant à l'émergence de structures telles que les bulles spéculatives, sans intervention externe directe. Un dernier exemple pour la route ? Les tâches de léopard et les zébrures des zèbres. Ces motifs complexes émergent spontanément à partir d'interactions locales entre les cellules de la peau et les molécules de signalisation chimique pendant le développement embryonnaire. Les motifs sont générés par des processus d'auto-organisation tels que la réaction-diffusion, où des substances chimiques réagissent entre elles et diffusent à travers le tissu, créant des motifs réguliers ou irréguliers selon les conditions locales. Ces motifs du pelage ne sont donc pas dictés par un plan directeur génétique détaillé, mais émergent plutôt de la dynamique complexe des interactions moléculaires et cellulaires.

Dans un réacteur à fusion nucléaire, les interactions mutuelles entre filaments de plasma ne sont pas une découverte, puisque ces interactions sont prédites par des modèles et que des observations indirectes ont déjà été rapportées. Le travail présenté dans la revue Physical Review E est néanmoins le premier qui illustre directement ce phénomène, et qui en présente une caractérisation issue d’un volume de données expérimentales statistiquement significatif.

Représentation artistique d'un filament de plasma dans un réacteur à fusion nucléaire
(image générée par IA)

Une réponse adaptée à un contexte d’imagerie hors norme

Pour y parvenir, notre doctorante Sarah Chouchène (1) a élaboré une nouvelle méthode d’analyse basée sur l’Intelligence Artificielle. Cette méthode a été appliquée à des données d’imagerie rapide, issues du tokamak COMPASS, situé à l’IPP Prague (République Tchèque) : 1 million d’images par seconde, bruitées et floues (conditions inhérentes au milieu étudié). La nouvelle méthode d’analyse a été validée en confrontant les résultats obtenus avec ceux fournis par le logiciel AX R&D qui utilise une approche différente. Les résultats présentés démontrent qu’environ 20 % des filaments de plasma interagissent fortement entre eux, permettant de valider pour la première fois d’autres travaux théoriques. 
Et, cerise sur le gâteau : de même que les phénomènes d’auto-organisation se produisent dans de très nombreux systèmes, la nouvelle méthode d’analyse que nous avons développée pourra s’appliquer à de nombreux domaines d’études, bien au-delà de la fusion nucléaire (2). 

(1) thèse cofinancée par APREX Solution, la région Grand Est et le CNRS, sous la co-direction de Frédéric Brochard (Institut Jean Lamour / APREX Solutions) et Mikael Desécures (APREX Solutions).
(2) c’est la raison pour laquelle nous avons choisi la revue Physical Review E, qui couvre les recherches sur les phénomènes non-linéaires et statistiques en physique et en biologie.


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